Le cadre mondial pour la biodiversité (KMGBF en anglais) est comparable à l’Accord de Paris de 2015 sur le dérèglement climatique.
La COP Biodiversité à l’heure de l’opérationnalisation des engagements
La 16e conférence mondiale sur la biodiversité (COP 16 Biodiversité) s’est achevée le 2 novembre 2024 à Cali, en Colombie. L’ambition de ce rendez-vous international ? Être la « COP de la mise en œuvre » face à l’urgence d’enrayer l’effondrement du vivant. Antonio Guterres, secrétaire général des Nations Unies, y a d’ailleurs rappelé que l’érosion de la biodiversité constitue une « crise existentielle ».
Ainsi, la COP 16 Biodiversité a sonné l’heure de l’opérationnalisation des engagements étatiques pris à Montréal lors de la COP15 de 2022. La 15e conférence des parties a été un rendez-vous capital pour la planète, comme le rappelait Positivéco. En effet, le sommet de Montréal s’est distingué par l’adoption d’engagements inédits pour lutter contre l’érosion de la diversité biologique. Avec ses 23 cibles à l’horizon 2030, le cadre mondial pour la biodiversité (CMB) de Kunming-Montréal est un accord historique. Le CMB engage les 196 États signataires à protéger 30 % des surfaces terrestres et 30 % des espaces maritimes, tout en restaurant 30 % des espaces naturels. Les pays développés se sont également engagés à aider les pays en développement à financer la préservation de la biodiversité. Ceux-ci devront mobiliser 20 milliards de dollars par an d’ici 2025 et 30 milliards par an d’ici 2030. Ce cadre mondial ambitieux est comparable à l’Accord de Paris de 2015 sur le dérèglement climatique.
La COP16 a entériné la création du « Fonds de Cali », qui vise au partage des bénéfices issus du séquençage des ressources génétiques.
Les parties ont également convenu d’un nouveau processus d’identification des zones marines d’importance écologique ou biologique (EBSAs).
Quels progrès pour le cadre mondial de la biodiversité à la COP Biodiversité ?
La 16e conférence des parties a-t-elle confirmé l’élan significatif de mise en œuvre de l’accord de Kunming-Montréal ?
3 avancées notables en matière de coopération internationale
Tout d’abord, la COP 16 Biodiversité a entériné la création du « Fonds de Cali ». Ce fonds multilatéral vise au partage des bénéfices issus du séquençage des ressources génétiques. Ainsi, le fonds Cali permettra aux entreprises qui utilisent de la biodiversité de rétribuer les pays d’origine de ces ressources. La moitié des fonds collectés devra être allouée aux communautés autochtones et locales. Toutefois, une limite est à noter : les entreprises concernées sont incitées et non contraintes à contribuer au fonds.
Les États membres ont également ratifié un accord multilatéral inédit. Ce texte reconnaît les peuples autochtones et les communautés locales comme des protagonistes clés de la conservation de la biodiversité. Un organe subsidiaire leur sera dédié, afin de garantir leur participation à la prise de décision en matière de biodiversité.
La COP 16 Biodiversité dispose de deux autres groupes de travail, l’un dédié à la recherche scientifique (SBSTTA) et l’autre à la mise en œuvre (SBI). Lors du sommet de Cali, le délégué francophone gabonais Jean Bruno Missika a été élu président du SBSTTA. A cette occasion, la France et le Gabon ont renforcé leur partenariat pour la biodiversité annoncé lors du One Forest Summit. Les deux États ont lancé le partenariat pour les écosystèmes forestiers, la nature et le climat ou Country Package. Accompagnés de partenaires comme l’ONG The Nature Conservancy, la France s’engage à soutenir les engagements gabonais de protection de la biodiversité en mobilisant 60 millions de dollars.
Des progrès pour la protection des zones marines importantes pour la biodiversité
Enfin, la COP16 a été le lieu de plusieurs autres décisions clés. Les parties ont notamment convenu d’un nouveau processus d’identification des zones marines d’importance écologique ou biologique (EBSAs). Ces critères sont essentiels à l’atteinte de l’objectif de protection de 30 % des zones océaniques d’ici 2030. En effet, il sera crucial de faciliter l’identification des zones marines à protéger, surtout dans les eaux internationales.
Les autres points à surveiller
Les États se sont également accordés sur les points suivants :
- Élaboration d’un plan d’action pour la biodiversité et la santé, afin de freiner l’émergence de maladies zoonotiques
- Nouvelles lignes directrices pour la gestion des espèces invasives
- Constitution d’un nouveau groupe d’experts sur la biologie de synthèse
- Appel à coordonner l’action climatique avec la protection de la diversité biologique.
Seuls 43 pays, dont la France et l’UE, ont soumis une stratégie nationale dédiée à l’atteinte des engagements du CMB.
Aucune décision concrète n’a été prise au sujet du cadre de suivi de l’avancement des États vers les objectifs du CMB.
La présentation des stratégies nationales biodiversité, pierre angulaire de l’opérationnalisation du Cadre mondial
La COP Biodiversité devait être l’occasion pour les États de présenter un plan d’action complet aligné avec l’accord de Kunming-Montréal. Pourtant, seuls 43 pays, dont la France et l’UE, ont soumis une stratégie nationale dédiée à l’atteinte des engagements du CMB. Ainsi, seul un petit groupe de pays a identifié les mécanismes concrets à mettre en œuvre pour atteindre les 23 objectifs du CMB. D’autre part, 119 pays ont soumis des engagements partiels liés à la biodiversité. Ces derniers n’ont donc pas encore formalisé de stratégie nationale alignée avec les objectifs de Montréal. Cet état des lieux est alarmant alors que les signataires n’ont plus que 6 ans pour réaliser leurs engagements.
De la même manière, la COP16 Biodiversité 2024 a peu progressé sur le cadre de suivi du Cadre mondial pour la biodiversité. Pourtant, les signataires devront fournir un premier rapport sur la pertinence de leur stratégie nationale à la COP17 de 2026. À Cali, des discussions ont eu lieu sur les procédures de suivi et d’examen prévues pour 2026 et 2030. Cependant, ces échanges n’ont pas abouti à une décision concrète. La cause de ce blocage ? Les parties n’ont pas réussi à s’entendre sur la manière combler le déficit de financement de la biodiversité.
Le déficit du financement de la biodiversité : sujet sensible de la 16ème conférence des NU sur la biodiversité
La particularité de l’accord mondial sur la biodiversité est d’être un plan d’actions adossé à un plan de financement.
Des besoins en financement clairement identifiés
La COP 16 Biodiversité a souligné le caractère délicat du sujet du financement du cadre mondial pour la biodiversité. En 2022, l’accord de Kunming-Montréal estimait le déficit de financement de la biodiversité à 700 milliards de dollars par an. En conséquence, le CMB prévoit de mobiliser 200 milliards de dollars par an, toutes sources confondues.
Pour le moment, les solutions de financement existantes semblent insuffisantes. Le fonds pour le Cadre mondial de Kunming-Montréal (GBFF) vise à soutenir l’effort de préservation de la biodiversité des pays en développement. Lancé en 2022, le GBFF ne dépasse aujourd’hui pas les 400 millions de dollars. Ce montant comprend pourtant les 163 millions promis lors de la COP16 par huit pays, dont la France. Ainsi, pour atteindre l’objectif de 200 milliards de dollars, un accord sur un mécanisme de financement multilatéral est essentiel. Pourtant, les discussions de la COP 16 Biodiversité n’ont pas permis aux parties de s’accorder sur une stratégie commune.
Des ressources disponibles mais non accessibles
À Cali, la présidence colombienne a présenté une feuille de route incluant la création d’un nouveau fonds pour la nature. Pour accélérer les efforts communs, plusieurs pays en développement militent pour la création d’un fonds global dédié à la biodiversité. En effet, les fonds existants leur semblent difficiles d’accès et inéquitables. Ces États souhaitent la création d’un nouveau fonds représentant tous les pays, placé sous l’autorité onusienne du CBD. À l’inverse, l’UE, le Canada, la Suisse et la Norvège s’opposent à la mise en place d’un énième fonds chronophage et contreproductif. Ainsi, à l’image du mécanisme de suivi du CMB, les débats sur son financement n’ont pas abouti. La conférence a été suspendue suite à la perte du quorum des délégués au matin du 2 novembre.
D’autre part, l’accord de Kunming-Montréal exige depuis 2022 des États signataires l’identification des subventions préjudiciables à la diversité biologique d’ici à 2025. Ce travail permettrait ensuite de réduire ces aides de 500 milliards de dollars par an d’ici à 2030. Cette cible n°18 n’a connu que très peu d’avancées au cours des dernières années, le montant des subventions continuant à augmenter. Par ailleurs, l’analyse des stratégies soumises par les parties révèle que cet objectif est le moins pris en compte au niveau national. Lors de la COP 16, les participants à la conférence des NU sur la biodiversité ont souligné l’urgence d’établir un cadre viable pour atteindre la cible 18.
Conclusion
La COP16 Biodiversité 2024 s’est achevée à Cali sans décision sur deux des enjeux clés des négociations. Ni les discussions sur la mobilisation des ressources financières ni celles sur le cadre de suivi du CMB n’ont abouti à un accord. Ces deux mécanismes sensés assurer le respect des engagements pris à Montréal pour sauver la nature ont été renvoyés à une prochaine session.
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