La directive européenne NFRD, qui encadre actuellement le reporting extra-financier des sociétés européennes, sera remplacée dès le début de l’année prochaine par la Corporate Sustainability Reporting Directive (CSRD).
Le 1er janvier 2024, la Commission Européenne va mettre en application une des législations les plus ambitieuses au monde en matière de reporting ESG : la Corporate Sustainability Reporting Directive (CSRD). D’ici deux mois, cette nouvelle directive va affecter directement plus de 50 000 entreprises en Europe et occasionner des répercussions indirectes sur toutes les entreprises appartenant à la chaîne de valeur des sociétés concernées.
Comment se préparer pour ce changement majeur qui constitue un challenge pour toutes les entreprises européennes ? Positivéco répond aux six questions les plus posées sur la directive CSRD.
Cette évolution réglementaire participe ainsi au “Plan d’action de l’Union Européenne pour la finance durable”, dont l’objectif majeur est d’associer le secteur financier aux objectifs climat de l’UE.
La CSRD vise à assurer aux investisseurs l’accès aux données extra-financières standardisées.
La nouvelle directive introduit des normes de rapport obligatoires pour toutes les grandes entreprises, les ESRS.
1. Qu’est-ce que la CSRD ?
La CSRD est la norme européenne en matière de reporting de durabilité. Elle prescrit la façon dont le reporting doit être préparé sur le fond et sur la forme. Le format électronique unique retenu par l’Europe permettra une utilisation sans limite de ces nouvelles données d’entreprise.
La directive européenne NFRD, qui encadre actuellement le reporting extra-financier des sociétés européennes, sera remplacée dès le début de l’année prochaine par la Corporate Sustainability Reporting Directive (CSRD). Cette évolution va également impacter la Déclaration annuelle de performance extra-financière (DPEF), qui est l’application française de la NFRD. Plus ambitieuse que la NFRD, la CSRD vise à renforcer les objectifs de l’Union Européenne en matière de finance durable en favorisant la convergence internationale du reporting de durabilité. Elle impose aux sociétés européennes de divulguer une longue liste de données non-financières (data points) selon un format électronique qui permet une utilisation et une comparaison sans limite. Cette évolution réglementaire participe ainsi au “Plan d’action de l’Union Européenne pour la finance durable”, dont l’objectif majeur est d’associer le secteur financier aux objectifs climat de l’UE.
Le paquet réglementaire formé par les nouvelles règlementations SFDR et Taxonomie exige des investisseurs la divulgation de nombreuses informations extra-financières sur leurs investissements : émissions de gaz à effet de serre, empreinte carbone, consommation d’énergie, écart de salaire entre hommes et femmes, etc. Ces exigences de reporting posent problème aux investisseurs concernés, car la plupart des entreprises ne publient pas ces informations, la loi ne les y obligeant pas. De la même manière, de nombreuses sociétés divulguent des informations ESG imprécises, biaisées et difficiles à comparer. La CSRD vise à remédier à ce problème en assurant aux investisseurs l’accès à des données extra-financières standardisées.
En exigeant des entreprises européennes qu’elles rendent compte chaque année de leur position en matière de développement durable, la CSRD vise à améliorer la transparence et la cohérence du reporting ESG en Europe. Ayant accès à des informations fiables, comparables et prospectives, grande nouveauté, sur le développement durable, les investisseurs auront ainsi les moyens de réorienter leurs investissements vers des technologies et des industries plus durables.
La CSRD étend le champ d’application et les exigences existantes : alors que la NFRD ne fournissait que des lignes directrices pour les rapports ESG, la nouvelle directive introduit des normes de rapport obligatoires pour toutes les grandes entreprises, les ESRS. Les entreprises concernées devront donc bientôt fournir des rapports extra-financiers améliorés, formatés et audités respectant le principe de double matérialité.
Il s’agit d’une étape importante pour le reporting ESG : avec la CSRD, les informations ESG seront soumises au même standard d’assurance que les rapports financiers. Les entreprises devront donc désormais traiter les données relatives à la durabilité avec la même rigueur que leurs données financières et dans une optique de moyen et long-terme.
Le champ d’application de la CSRD étend significativement celui de la NFRD.
2. Qui est concerné par la CSRD et quand ?
Entités concernées | Exercice référence | 1er reporting | Standards |
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Grandes entreprises européennes et non-UE soumises à la NFRD
Entités d’intérêt public et sociétés non européennes cotées sur les marchés européens répondant aux 2 critères suivants :
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2024 | 2025 | ESRS |
Autres grandes entreprises européennes et non-UE
Sociétés européennes et sociétés non-UE cotées sur les marchés européens répondant à 2 des critères suivants :
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2025 | 2026 | ESRS |
PMEs cotées sur les marchés européens
A l’exception des microentreprises ne répondant pas à 2 des critères suivants :
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2026 – possible report à 2028 | 2027 – possible report à 2029 | ESRS simplifié |
Autres grandes entreprises non-européennes
Sociétés non européennes répondant aux 2 critères suivants :
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2028 | 2029 | ESRS simplifié |
Le champ d’application de la CSRD étend significativement celui de la NFRD : la nouvelle directive couvrira progressivement près de 50 000 entreprises européennes, contre 11 700 selon les règles actuelles. La CSRD affectera également environ 10 000 entreprises étrangères, principalement américaines.
La double matérialité permet aux entreprises de fournir une vision d’ensemble. Les investisseurs comprendront à la fois l’impact des enjeux de durabilité sur leur situation et la performance financières, et l’impact de leurs activités sur l’environnement et la société.
Il incombe aux entreprises d’effectuer une analyse de double matérialité afin d’identifier les thématiques ESG sur lesquelles elles doivent collecter des données.
3. Comment choisir les données à reporter ? Qu’est ce que la double matérialité ?
Les entreprises concernées par la CSRD sont tenues d’adopter une perspective de double matérialité au cœur de leur pilotage et donc reporting.
Le concept de double matérialité a été défini par le règlement “Disclosure” sur la publication d’informations en matière de durabilité dans le secteur des services financiers, ou Sustainable Finance Disclosure Regulation (SFDR) :
- La matérialité financière désigne l’impact des risques et des opportunités relatifs aux facteurs environnementaux, sociaux et de gouvernance sur les résultats d’une entreprise. C’est une perspective ‘outside-in’.
- La matérialité d’impact désigne l’impact d’une entreprise sur son environnement économique, social et environnemental. Elle prend en compte l’impact direct des activités de l’entreprise ainsi que son impact indirect lié à ses fournisseurs et partenaires. C’est une perspective ‘inside-out’.
Pour l’AMF, l’analyse de double matérialité menée par les sociétés doit permettre d’identifier les thématiques de durabilité reflétant les principaux risques, opportunités et impacts ESG de l’entreprise liés à ses activités et à sa chaîne de valeur. La double matérialité permet donc aux entreprises de fournir une vision d’ensemble : les investisseurs comprendront à la fois l’impact des enjeux de durabilité sur leur situation et performance financières et l’impact de leurs activités sur l’environnement et la société.
La CSRD marque ainsi la fin des rapports de durabilité désincarnés, consistant uniquement à collecter des données une fois par an, sans vision stratégique, sans objectifs et sans pilotage.
Il incombera aux entreprises d’effectuer une analyse de double matérialité afin d’identifier les thématiques ESG sur lesquelles elles doivent collecter des données. Seule la thématique climatique est jugée d’emblée matérielle pour toutes les entités par la Commission européenne. Les entreprises estimant que le climat n’est pas matériel à leur activité devront fournir une explication détaillée.
Pour se familiariser avec cette double analyse, les entreprises pourront se référer au guide de l’European Financial Reporting Advisory Group (EFRAG) sur l’analyse de matérialité, en cours d’élaboration.
Les sociétés concernées par la CSRD sont tenues d’aligner leur reporting avec les nouvelles normes européennes d’information en matière de durabilité, élaborées pour l’occasion.
Toutes les données publiées dans le cadre de la CSRD devront également être auditées par un organisme tiers indépendant.
4. Sous quel format faut-il présenter ces données ? Qu’est-ce que l’ESRS ?
Les données extra-financières exigées par la CSRD devront être publiées au sein d’une section dédiée du rapport de gestion de l’entreprise, et non dans un rapport de durabilité séparé dont la publication pouvait être différée. Quatre sections d’informations différentes sont attendues dans un ordre précis: générales, environnementales, sociales, de gouvernance.
Les sociétés concernées par la CSRD sont tenues d’aligner leur reporting avec les nouvelles normes européennes d’information en matière de durabilité, élaborées pour l’occasion. La première version des 12 European Sustainability Reporting Standards (ESRS) a été publiée en Novembre 2022 par l’EFRAG.
Selon un schéma assez classique, deux normes transversales, ESRS 1 (exigences générales) et ESRS 2 (informations générales) s’appliquent à l’ensemble des thématiques de durabilité. Dix normes thématiques abordent les trois piliers ESG : les entreprises devront évaluer lesquels de ces dix sujets sont matériels à leur activité. Les normes ESRS indiquent ensuite précisément les éléments à évaluer, mesurer et divulguer, y compris les indicateurs et les objectifs pertinents.
- 5 normes relatives aux questions environnementales
- 4 normes relatives aux questions sociales
- 1 norme relative à la gouvernance
- ESRS G1 : Conduite responsable des entreprises
Afin d’éviter le greenwashing volontaire et accidentel, la CSRD prévoit également que toute entreprise faisant référence à des activités « bas carbone » ou « durables » doive démontrer en quoi ces dernières sont alignées avec la taxonomie européenne.
Le rapport de gestion de l’entreprise devra être publié dans un format électronique unique européen xHTML. Des balises digitales seront intégrées au reporting ESG afin de faciliter la lecture, la comparaison des données et la recherche au sein des rapports.
Toutes les données publiées dans le cadre de la CSRD devront également être auditées par un organisme tiers indépendant. Cette assurance tierce s’appliquant à des données dont la sélection dépend d’une analyse de matérialité, on peut s’attendre à ce que le test de matérialité soit aussi audité.
Les grandes entreprises cotées ne sont pas les seules à devoir se soucier de leur préparation à ces nouvelles exigences de reporting.
Dès l’année prochaine, les petites et moyennes entreprises opérant dans l’univers business-to-business devront répondre aux sollicitations de leurs clients devant prendre en compte l’impact de leur chaîne d’approvisionnement.
5. Est-ce que les PMEs sont concernées par la CSRD ?
Il est essentiel de comprendre que la taille de l’entreprise n’est plus un argument pour ne pas agir.
Seules les PMEs cotées sur les marchés européens sont directement concernées par la CSRD et devront se conformer au reporting CSRD sur la base de normes ESRS simplifiées. Grâce à une période transitoire de deux ans, ces entreprises peuvent cependant retarder l’application des exigences CSRD jusqu’en 2028, attendu qu’elles justifient ce report dans leur rapport de gestion.
Si l’horizon d’application de la directive CSRD peut sembler lointain pour les PMEs concernées, les autorités européennes recommandent aux entreprises de se familiariser avec les exigences de la CSRD et le contenu des ESRS au plus tôt.
Les PMEs non cotées sur les marchés européens ont également intérêt à se préparer à l’entrée en vigueur de la nouvelle directive. Dès l’année prochaine, les petites et moyennes entreprises opérant dans l’univers business-to-business devront répondre aux sollicitations de leurs clients devant prendre en compte l’impact de leur chaîne d’approvisionnement.
Avec l’entrée en vigueur de la CSRD, le reporting de durabilité cesse d’être réservé aux très grandes entreprises et aux conglomérats : les PMEs n’ont d’autre choix que de reconnaître qu’elles font partie intégrante de la chaîne d’approvisionnement qui alimente les rapports de durabilité des grandes entreprises. Il s’agit donc pour les petites et moyennes entreprises de se préparer à collecter les données extra-financières qui leur permettront de répondre aux sollicitations et aux questionnaires, voire aux audits de leurs partenaires. Cette transition est également l’occasion pour les PMEs de montrer que leur propre maturité en termes d’intégration ESG contribue à l’atteinte des objectifs de durabilité de leurs clients.
Les grandes entreprises cotées ne sont donc pas les seules à devoir se soucier de leur préparation à ces nouvelles exigences de reporting.
Anticiper les demandes de ses clients et se mettre en conformité avec la CSRD est l’occasion pour les entreprises de se démarquer.
Il ne s’agit pas seulement de cocher des cases règlementaires mais de construire un modèle d’affaires durable et résilient.
S’engager pour la transparence des entreprises et pour la prise en compte de leur impact négatif sur l’environnement et la société permet de créer de nouvelles opportunités commerciales et d’assurer la rétention des talents.
6. Comment bien préparer son reporting de durabilité et se mettre en conformité avec la CSRD ?
1. Revoir son positionnement concurrentiel
Les nouvelles réglementations portant sur le reporting extra-financier ont vocation à toucher l’ensemble de la chaîne de valeur des entreprises européennes. Anticiper les demandes de ses clients et se mettre en conformité avec la CSRD est l’occasion pour les entreprises de se démarquer. Les régulateurs s’attendent à voir les grandes entreprises devenir de plus en plus strictes dans leur processus de sélection de fournisseurs et de prestataires de service.
2. Réaliser une analyse stratégique complète
L’exercice du reporting CSRD et la perspective de la double matérialité associée constituent une analyse stratégique complète pour toutes les entreprises.
En appliquant une perspective stratégique à l’élaboration d’un reporting ESG, les entreprises peuvent identifier des domaines d’amélioration, renforcer leur efficacité opérationnelle et favoriser l’innovation. Il ne s’agit pas seulement de cocher des cases règlementaires mais de construire un modèle d’affaires durable et résilient.
3. Informer complètement la prise de décision
L’élaboration d’un rapport de durabilité implique de s’immerger dans le détail des opérations et des chaînes d’approvisionnement d’une entreprise. Celle-ci peut ainsi mieux comprendre son impact social et environnemental, et disposer de données pertinentes pour la prise de décision, la gestion des risques et les stratégies de réduction des coûts.
4. Se rapprocher de ses parties prenantes
Se lancer dans la construction ou l’amélioration de son reporting ESG est également l’occasion d’échanger avec ses parties prenantes : clients, employés, investisseurs, fournisseurs, etc. S’engager pour la transparence des entreprises et pour la prise en compte de leur impact négatif sur l’environnement et la société permet de créer de nouvelles opportunités commerciales et d’assurer la rétention des talents.
5. Envisager la durabilité comme stratégie long-terme
En mettant en place un reporting extra-financier régulier, les PMEs évoluent généralement d’une approche fondée sur la conformité à une approche stratégique. L’intégration de l’extra-financier à l’approche stratégique globale permet à ces entreprises de définir une vision à long-terme de leur stratégie de durabilité et ainsi de faire face à leurs responsabilités croissantes en matière environnementale et sociale.
Grandes, moyennes et petites entreprises ont tout intérêt à se préparer dès maintenant à cette transition du reporting ESG.
La directive CSRD constitue un réel changement de paradigme en introduisant l’une des législations les plus ambitieuses au monde en termes de reporting ESG. Cette nouvelle règlementation touchera directement 50 000 entreprises en Europe et affectera indirectement l’ensemble de la chaîne de valeur des sociétés concernées. Grandes, moyennes et petites entreprises ont tout intérêt à se préparer dès maintenant à cette transition : il s’agit d’abord de comprendre ses obligations CSRD, de faire évoluer l’analyse de matérialité en analyse de double matérialité et d’effectuer une analyse d’écart pour établir la marche à suivre et mobiliser le personnel nécessaire.
A propos de Positivéco
Chez Positivéco, nous percevons les nouvelles réglementations nationales et internationales en RSE comme des vecteurs de croissance positive.
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