Les enjeux de diplomatie européenne étaient de taille : accroitre les engagements des Parties, influer sur la promesse faite par les pays développés aux pays en voie de développement de mobiliser 100 milliards de dollars annuels entre 2020 et 2025, rendre pleinement opérationnel l’Accord de Paris, aller vers une harmonisation des documents de référence.
13 nouveaux États, dont l’Inde, l’Arabie Saoudite ou encore l’Australie et le Nigeria se sont fixé un objectif de neutralité carbone pour 2050, 2060 ou 2070. Plus de 100 États ont accepté de réduire leurs émissions de gaz à effet de serre d’ici à 2030 et 137 États se sont engagés à stopper et à inverser la déforestation d’ici à 2030.
L’Union Européenne souhaite être un acteur de premier plan dans la lutte pour le climat, mais son succès dépend de l’alignement des nations participant à la COP26
L’entrée en vigueur de la Loi Européenne sur le climat le 29 juillet dernier a démontré que l’Union européenne souhaite incarner un modèle dans la gouvernance internationale du changement climatique et ainsi impacter sur celle de l’ensemble de ses partenaires extérieurs.
L’adoption de l’objectif européen de neutralité climat d’ici à 2050, ainsi que de réduction nette des émissions de gaz à effet de serre de 55% d’ici 2030 par rapport aux niveaux de 1990, doit en effet permettre à l’Union européenne d’aligner sa stratégie climat avec l’objectif fixé dans l’Accord de Paris de limiter l’augmentation de la température mondiale à 1,5 degré.
C’est donc avec de hautes mais non moins nécessaires ambitions que l’Union et ses Etats membres ont participé à la 26e conférence des Parties, ou COP26, tenue à Glasgow du 31 octobre au 13 novembre 2021.
L’Union européenne ne peut agir seule et les enjeux de diplomatie européenne, afin de permettre une accélération de la décarbonisation mondiale, étaient de taille : accroitre les engagements des Parties, influer sur la promesse faite par les pays développés aux pays en voie de développement de mobiliser conjointement 100 milliards de dollars annuels entre 2020 et 2025, rendre pleinement opérationnel l’Accord de Paris, ou encore aller vers une harmonisation des documents de référence, en particulier les contributions déterminées au niveau national (lisser les règles de calcul des inventaires des gaz à effet de serre notamment).
Plus d’un mois après la COP26 quel est le bilan ?
L’engagement accru de nombreux États et les nouvelles initiatives visant à réduire l’impact de l’homme sur le climat ne suffisent pas à atteindre les objectifs fixés par l’Accord de Paris
Certes les ambitions climatiques ont augmenté : 13 nouveaux Etats, dont l’Inde, l’Arabie Saoudite ou encore l’Australie et le Nigeria ont instauré la neutralité carbone comme un objectif pour 2050, 2060 ou 2070. Plus de 100 Etats ont également accepté de réduire leurs émissions de gaz à effet de serre d’ici à 2030 et 137 Etats se sont engagés à stopper et à inverser la déforestation d’ici à 2030.
D’autres initiatives de taille peuvent être citées :
Néanmoins, force est de constater que ces mesures permettent au mieux une augmentation de la température mondiale de 2,3°C, bien au-dessus de l’objectif privilégié par l’Accord de Paris (1,5 °C).
Les 100 milliards de dollars de financement annuels promis aux pays en développement en 2015 ne seront atteints qu’en 2023, les pays développés préférant financer leur relance post-Covid. Cette situation rend la cible des 1,5 °C d’autant plus difficile à atteindre puisque les objectifs de réduction des émissions des pays en développement restent systématiquement conditionnés à l’obtention d’une aide technologique et financière adéquate.
Par ailleurs, les engagements sont souvent pris sans les principaux concernés, on peut ici citer la non-participation de la Chine, de l’Inde et de la Russie au Global Methane Pledge. De plus, sur les 153 pays ayant déterminé un objectif de neutralité carbone, seuls 61 ont à ce jour concrétisé leurs engagements par le biais d’une loi ou d’un document politique. La non-participation de la France et de l’Allemagne à l’Accord véhicules neufs zéro émission, et ce alors même que la Commission européenne avec son « Pacte vert » vise un objectif identique, illustre également qu’il n’est pas aisé d’inscrire l’ensemble des Parties dans une dynamique positive.
L’Union Européenne doit parvenir à un alignement de ses Etats membres sur les objectifs de la Loi Climat européenne, ce qui nécessite la validation et l’application urgente des mesures du ‘Fit for 55’
Sur son propre territoire, l’Union européenne elle-même peine à coordonner l’ensemble des politiques climatiques de ses membres. Bien que la Loi Européenne sur le climat soit entrée en vigueur, l’enjeu de crédibilité reste de taille : l’Union européenne doit définir un cadre réglementaire à la hauteur de ses ambitions de transition bas carbone.
Deux propositions semblent notamment au centre des attentions : la création du mécanisme d’ajustement carbone aux frontières (MACF) et la fin de la vente des véhicules neufs thermiques d’ici 2035.
Bien que la Loi Européenne sur le climat soit entrée en vigueur, l’enjeu de crédibilité reste de taille : l’Union européenne doit définir un cadre réglementaire à la hauteur de ses ambitions de transition bas carbone.
Première proposition: la création du mécanisme d'ajustement carbone aux frontières (MACF)
Cette proposition vise à imposer à certains produits fabriqués hors UE la tarification carbone en vigueur sur les mêmes produits européens. Cette taxe carbone aux frontières, qui serait une première mondiale, cible les secteurs du ciment, de l'acier, du fer, de l'aluminium, de l'engrais et de l'électricité. Une telle mesure assurerait une compétitivité plus juste entre les acteurs industriels européens et étrangers, éviterait les « fuites de carbone » (les délocalisations de certaines productions polluantes), serait une source de revenus : jusqu’à 10 milliards d’euros par an, et pourrait inciter certains pays à diminuer leurs émissions.
A ce jour cette disposition ne fait pas consensus au sein des États membres, certains d’entre eux craignant des représailles protectionnistes, notamment des Etats-Unis et de la Chine, pouvant impacter leur balance commerciale.
Seconde proposition: la fin de la vente des véhicules neufs thermiques d’ici 2035
Cette proposition, qui vise zéro émission pour tous les véhicules neufs vendus à partir de 2035, ne fait pas non plus l’unanimité. Les pays ayant une industrie automobile y sont particulièrement opposés et suggèrent la mise en place d’une dérogation jusqu’en 2039 pour les véhicules à faibles émissions les plus performants. De nombreuses suppressions d’emplois seraient en jeu : 501 000 chez les fournisseurs automobiles selon l’Association européenne des fournisseurs automobiles (CLEPA). C’est toute une industrie qui devra se reconvertir dans la création d’une filière européenne compétitive de batteries afin de réduire une telle perte d’emplois.
Ainsi, l’Union européenne veut montrer l’exemple : limiter l’augmentation de la température mondiale à 1,5 degré et démontrer qu’une transition bas carbone collective, équitable et fondée sur la coopération est possible. Néanmoins, d’après l’Union européenne, seule la validation de la totalité des 14 propositions du « Fit for 55 » pourra permettre l’atteinte de cet objectif. L’adoption du Paquet Climat doit donc rassembler au-delà des contradictions étatiques et des arbitrages économiques et sociaux massifs qu’il implique.
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